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ANGÈLE DUBEAU ET LE SENTIMENT DU DEVOIR BIEN FAIT

DANIEL CÔTÉ dcote@lequotidien.com

Angèle Dubeau flottait sur un nuage, mardi, lorsque le représentant du Quotidien a repris contact avec elle. L’objet de cette conversation était l’album Signature Philip Glass, le 48e de sa carrière, mis en marché par Analekta. Or, pas plus tard que la veille, à la Maison Symphonique de Montréal, la violoniste et ses consoeurs de La Pietà en avaient servi de larges tranches à un public manifestement ravi.

«J’avais fait le choix de présenter des pièces de Glass et d’Einaudi. Elles sont différentes, mais je suis fière de mon coup parce que nous avons produit des bulles de bien-être qui ont montré à quel point c’est unique, la magie d’un concert. Dans une salle qui était comble avec 1800 personnes, j’ai fait le plein d’amour. Tout le monde était heureux, ce qui me donne de l’adrénaline pour continuer», a-t-elle confié.

Comme sur le nouvel enregistrement, les 12 membres de La Pietà ont amorcé le concert avec

Opening, un extrait de la pièce

Glassworks. Dès les premières secondes, ses textures délicatement entremêlées amènent l’auditeur à mettre sa raison à «off». On entre dès lors dans une forme de semi-conscience, entretenant des sentiments qui, selon l’état d’esprit dans lequel on se trouve, apaisent ou suscitent de la mélancolie.

«La musique minimaliste, c’est des boucles, des répétitions, énonce Angèle Dubeau. Dans ce cas-ci, j’ai produit des bulles rythmiques et des strates de couleurs sonores qui nous envoûtent, qui deviennent comme un mantra. Hier [lundi], une auteure m’a dit que lorsqu’elle écrivait en écoutant du Philip Glass, il lui venait plein d’idées. C’est l’effet que génèrent ses compositions.» Carburer «à la chair de poule» Au moment de sélectionner les titres qui ont abouti sur Signature Philip Glass, justement, elle a souhaité représenter diverses facettes du travail de l’Américain. Recoupant plusieurs décennies, elles tranchent aussi par rapport aux interprétations qui avaient été livrées dans Portrait, l’album de 2008 où ce répertoire fut à l’honneur pour la première fois.

«Quand vient le temps d’effectuer mes choix, j’écoute plein de choses et si je suis interpellée, si j’ai quelque chose de personnel à ajouter et si j’ai le goût, surtout, ça fonctionne. Chaque fois, je carbure à la chair de poule», affirme la violoniste, qui voit en Philip Glass une icône au même titre que Picasso l’a été en son temps.

Ayant la chance de le connaître depuis les années 1980, elle a eu carte blanche pour adapter ses compositions et pas juste à la marge. De surcroît, l’équipe de Glass a fait preuve d’un empressement exemplaire quand les camarades du Québec avaient besoin d’obtenir des informations, des partitions et même, à l’occasion, des manuscrits. Quelques jours et c’était réglé.

«Des fois, juste pour une partition, ça prend des mois», illustre Angèle Dubeau, dont l’autre atout tenait à la complicité qui s’est développée au sein de La Pietà. Toutes ses membres ne sont pas là depuis sa fondation il y a 26 ans, ce qui est le cas de la pianiste Amélie Fortin, originaire du LacSaint-Jean. Néanmoins, il s’est écoulé suffisamment de temps pour former un ensemble très soudé.

«On se connaît beaucoup et sur scène, on se devine», confirme celle qui assume la fonction de soliste. C’est aussi elle qui adapte les compositions avant de passer beaucoup d’heures avec ses consoeurs, le temps de mettre ce répertoire à leur main. Pour cet album, par exemple, elle voulait «plus de velours et plus de perle», ce qui, de son point de vue, nécessitait un contrôle absolu.

«Comme avec la musique d’Arvo Pärt, on doit avoir un métronome interne, ainsi que des points d’ancrage, pour que toutes les interprètes se retrouvent ensemble. Et puisqu’il y a des sons qui ne finissent plus, au niveau de l’archet, ça prend une technique particulière», explique Angèle Dubeau, qui a appris que Philip Glass écouterait l’album en fin de semaine, à la suite d’un déplacement à l’étranger.

Cette perspective la rend-elle nerveuse, même juste un peu? Empreinte de sérénité, la réponse est non, tout simplement. «Ayant produit cet enregistrement avec tout le respect que j’ai pour Philip Glass, le sentiment qui m’habite aujourd’hui est celui du devoir bien fait», résume la violoniste.

ARTS ET SPECTACLES

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2023-12-02T08:00:00.0000000Z

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