Des gens d’affaires refusent de laisser les itinérants geler dans des tentes

Une coalition de gens d’affaires initiée par le président et fondateur de Devcore, Jean-Pierre Poulin, est sur le point de se former, à Gatineau, afin de venir en aide à la centaine d’itinérants qui se sont installés dans le secteur du site Guertin, au centre-ville.

Des discussions amorcées en ce sens la semaine dernière se sont rapidement intensifiées dans les derniers jours. Les dirigeants des entreprises Multivesco, Junic et Brigil ont déjà signifié leur intention de s’engager dans le mouvement, si bien que l’effet boule de neige pourraient rapidement déboucher sur des actions concrètes.

Une première rencontre entre les représentants de Devcore et la mairesse de Gatineau, France Bélisle, il y a une semaine, a permis de structurer l’initiative. Les liens ont rapidement été faits avec le Centre intégré de santé et de services sociaux de l’Outaouais (CISSSO), les organismes partenaires et les fonctionnaires municipaux. Même le ministre responsable des Services sociaux, Lionel Carmant, a été mis au fait de l’offre de Devcore par Mme Bélisle, la semaine dernière.

Une rencontre extraordinaire regroupant plusieurs personnalités du Gatineau Inc s’est tenue dans un restaurant du secteur Hull, mardi soir. Des développements qui auraient un impact direct sur la qualité de vie et la sécurité des gens au campement pourraient survenir aussi rapidement que dans les prochains jours, selon nos informations.

«Ce n’est pas obligé d’être comme ça, lance M. Poulin en entrevue. Oui, il y aura probablement toujours de l’itinérance, et on peut ajouter à ça la maladie mentale et les drogues, mais ce n’est pas obligé d’être aussi souffrant pour ces gens-là. On n’est pas obligé de les laisser geler dehors dans de petites tentes de toile. On n’est pas obligé d’accepter que des gens souffrent à ce point sur notre territoire. Je crois sincèrement que ce n’est pas uniquement la responsabilité de la Ville, du gouvernement et des organismes. C’est aussi la responsabilité des promoteurs et des gens d’affaires qui sont capables d’aider, de contribuer rapidement et ponctuellement avant l’hiver.»

La mairesse Bélisle salue chaleureusement l’initiative du président de Devcore. «Je suis très contente de voir le milieu des affaires se sentir interpellé par la situation de l’itinérance sur notre territoire et de considérer que c’est aussi leur responsabilité d’intervenir», a-telle affirmé.

M. Poulin dit avoir plusieurs idées d’intervention en tête. Il dit d’abord chercher des façons de s’assurer que les gens puissent avoir du chauffage et de l’électricité sur place. L’aménagement d’un véritable bloc sanitaire permettant de desservir la population itinérante est aussi essentiel, insiste-t-il. La coalition de gens d’affaires est aussi déterminée à travailler directement avec l’organisme Itinérance Zéro pour maintenir les services de la Marmite à Joe dans le secteur de Pointe-Gatineau. «Ça va prendre de l’argent et on est plusieurs qui sommes prêts à s’engager pour offrir au moins un minimum de confort à ces gens-là.» Les gens d’affaires se seraient déjà entendus sur un premier effort financier qui avoisinerait les 300 000$.

LE 117, CARILLON MIS À CONTRIBUTION?

L’intervention du grand patron de Devcore auprès du cabinet, la semaine dernière, est survenue à un moment clé, précise la mairesse Bélisle. Quelques jours auparavant, la Ville venait d’apprendre que l’immeuble [voisin du site Guertin] du 117, rue Carillon, que souhaitait démolir l’Office d’habitation de l’Outaouais (OHO) dès janvier pour y construire des logements sociaux doit finalement demeurer en place jusqu’au printemps.

Le Droit avait appris que de sérieuses démarches ont été entreprises par la Ville auprès de l’OHO afin de convertir temporairement l’immeuble en bloc sanitaire chauffé et en espace d’entreposage; deux demandes récurrentes et pressentes des personnes en situation d’itinérance.

«On trouvait assez malaisant qu’il y ait un bâtiment vacant dans ce quadrilatère, a affirmé France Bélisle. On trouvait ça sérieusement gênant en fait. Dès qu’on a su ça, on s’est mis sur le téléphone pour s’assurer que cet immeuble ne resterait pas vacant jusqu’à sa démolition par l’OHO, alors que la situation est à ce point difficile juste à côté. On cherche activement des solutions pour exploiter l’immeuble. On a discuté avec l’OHO qui est propriétaire. La Ville pourrait absorber les coûts fixes, comme l’électricité, pour utiliser l’immeuble cet hiver. On a aussi eu des discussions avec le CISSSO et les organismes partenaires pour voir quels genres de services pourraient être offerts à l’intérieur. Estce que le secteur privé du milieu de la construction pourrait participer à certains aménagements rapidement à l’intérieur du bâtiment? On ne parle pas d’un endroit d’hébergement, mais d’un lieu qui servirait à répondre à d’autres besoins identifiés par les organismes et les gens du campement depuis longtemps.»

L’Office d’habitation de l’Outaouais n’a pas donné suite à la demande d’informations du Droit. Dans une déclaration écrite, le président-directeur général par intérim du CISSSO, Yves St-Onge, confirme avoir eu un échange avec la mairesse Bélisle au sujet d’une proposition de la compagnie Devcore. «On a convenu ensemble de mettre à profit nos différentes équipes pour que cellesci regardent ce qu’il est possible de faire rapidement, a-t-il écrit. Je tiens à remercier Mme Bélisle pour son engagement et son agilité à saisir toutes les offres possibles afin de soutenir les personnes en situation d’itinérance.»

La mairesse de Gatineau précise que les échanges d’informations vont se poursuivre entre le regroupement initié par M. Poulin et la Ville de Gatineau afin de valider les différents éléments techniques et réglementaires qui pourraient se présenter. «Au-delà que la question du confort et de la chaleur, moi c’est la sécurité des gens qui me préoccupent, a affirmé Mme Bélisle. On voit des incendies dans les tentes. Les gens brûlent du Purrel pour se chauffer. Il vient un moment ou nos actions doivent être guidées par la sécurité sur le site.