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COMME ON ATTEND LE PRINTEMPS

STEVE BERGERON steve.bergeron@latribune.qc.ca

Dès juillet 2022, le nouvel album de Matt Holubowski, celui-là même qui vient de paraître vendredi, était pratiquement terminé. Telle une véritable gestation, l’auteur-compositeur-interprète l’a laissé dormir environ neuf mois, tenant bien en laisse l’envie de faire des retouches. C’est donc l’esprit totalement libre qu’il a pu consacrer son automne et son hiver à… l’écriture d’autres chansons.

«Auparavant, je me serais abstenu, par crainte qu’au moment de la sortie du disque, je trouve meilleures mes plus récentes compositions. Mais j’étais vraiment sur un élan créatif très productif. J’ai aussi poursuivi mon apprentissage de l’aspect technique du métier [amorcé notamment pour meubler la pandémie, si bien qu’il cosigne la réalisation de sa neuve galette]. J’ai loué un chalet où j’ai déménagé mon studio presque au complet, pendant un peu moins de deux mois, pour écrire et composer. Aujourd’hui, j’ai plusieurs nouvelles chansons, des débuts de chansons, des expérimentations instrumentales, des essais et erreurs…»

«Mais là, je suis vraiment très, très, très prêt pour la scène», se dépêche d’ajouter l’ancien finaliste de La voix (cuvée 2015), qui commence sa tournée de concerts dès la semaine prochaine.

«Ça fait longtemps que j’attends», dit-il à propos de Like Flowers on a Molten Lawn, son quatrième opus, qui l’emmène sur des sentiers sonores différents, notamment celui de la musique électronique, mais également (et un peu paradoxalement) vers la crème de l’acoustique, soit l’intervention d’un orchestre symphonique, plus quelques cuivres.

«Ça ressemble beaucoup plus au genre de musique que j’écoute depuis toujours. Mes influences pour cet album viennent surtout de l’instrumental. Mon bassiste Marc-André Landry, qui est une véritable encyclopédie musicale, m’envoie beaucoup de musique électronique expérimentale japonaise. J’ai aussi fait jouer en boucle le dernier Pharoah Sanders, et tous les Flore laurentienne de ce monde.»

LAISSER LE TEMPS AU PRINTEMPS

Matt Holubowski a construit l’univers de son nouvel album à partir du poème Spring is like a perhaps hand de l’auteur américain Edward Estlin Cummings.

«C’est un texte qui illustre le printemps de très belle manière. Comme si on le regardait par la fenêtre, en train de s’installer très tranquillement, de la même façon qu’un peintre réalise un tableau, une touche de couleur à la fois, avec, entre chacune, beaucoup de temps d’observation et de recul.»

Une image que Matt a trouvée très apaisante. «Quand tu es dans le chaos de la musique, tout bouge très vite. Les échéanciers de production d’un album peuvent engendrer une pression qui va à l’encontre de la création. J’ai pris conscience que je rêvais d’avoir un moment pour créer comme celui qu’évoque ce poème. On était en 2016. C’est seulement en 2021 que j’ai revisité cette idée. Ce texte m’accompagne donc depuis des années, sans que j’aie accès à un tel moment… Jusqu’à ce que tout arrête en 2020», résume-t-il.

Cette constatation lui a inspiré la chanson Flirt with Boredom, qui a connu au moins cinq versions en sept ans avant de finalement trouver sa place sur Like Flowers on a Molten

Lawn. On pourrait d’ailleurs croire que les nouvelles chansons de Matt Holubowski, lesquelles abordent des thèmes comme la fragilité de la vie et la nécessité de laisser le temps au temps, tirent leur source des deux années où la planète s’est retrouvée figée, même si ce genre de lucidités peut survenir dans de multiples autres circonstances.

«Ce n’est pas un album pandémique, mais j’ai eu mes prises de conscience comme tout le monde. La lenteur et l’incertitude ont d’abord été vécues d’une façon anxiogène par beaucoup de gens, mais la plupart ont été capables de dépasser ça, de réaliser que c’était comme ça qu’on vivait autrefois, et qu’il y a une valeur intrinsèque dans la lenteur et dans le fait de ne pas avoir toutes les réponses. L’insouciance de l’ignorance n’est pas forcément une mauvaise chose», résume Matt Holubowski.

FLEURS SUR LA LAVE

Aucun doute en visionnant le clip d’End Scene : c’est carrément de la mort dont Matt nous parle dans les six minutes et demie de la pièce d’ouverture.

«En fait, surtout de cette vérité que le travail de toute une vie peut s’éteindre à tout moment. C’est un peu nihiliste comme idée, mais la beauté, c’est de simplement faire ce travail. Comme on l’entend souvent, le chemin est plus important que la destination.»

C’est d’ailleurs dans cette chanson que se trouve le vers-titre de l’album, une image de fleur sur la lave, vue en rêve et exprimant la fragilité et la détermination des êtres humains.

L’artiste explore aussi les cycles de fin et de recommencement (grands ou petits), les saisons, les idées, les époques, la vie, l’amour. En fait, on peut avoir l’impression que l’opus part dans plusieurs directions. Matt Holubowski est le premier à reconnaître cette grande liberté qu’il s’est laissée dans l’écriture, liberté qui est peut-être, justement, la véritable colonne du disque, celle de se mettre le moins de barrières possible.

«Dans la chanson Sandy Cove, par exemple, il y a au moins quatre sujets différents», dit-il, précisant que le principal serait probablement celui de la radicalisation des opinions chez bon nombre de personnes, à cause des algorithmes des réseaux sociaux, ce qui a conduit à briser des familles et des amitiés.

«C’est probablement mon texte le plus décousu, mais il est aussi représentatif de ma façon d’écrire : plein de petites idées un peu reliées, mais où certains couplets ont été écrits sans trop tenir compte de ce que dit celui d’avant, pourvu que la rythmique soit bonne.»

Matt Holubowski sera en concert le 26 mai à la salle Edwin-Bélanger de Montmagny, le 27 mai à l’auditorium Massey-Vanier de Cowansville, le 9 juin au Théâtre Banque-Nationale de Chicoutimi et le 10 juin au Théâtre Granada de Sherbrooke. Des dates seront bientôt annoncées pour Waterloo, Gatineau et Québec.

ARTS ET SPECTACLES

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2023-03-25T07:00:00.0000000Z

2023-03-25T07:00:00.0000000Z

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