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ÂME EN EXIL, POUR TENDRE LA PAROLE

CLAUDIA BLAIS-THOMPSON cbthompson@ledroit.com

En écrivant les textes que forment Histoires slamméees (Planète rebelle, 2017), Franck Sylvestre savait que «ça allait se rendre sur scène» un jour ou l’autre.

Ce livre-disque s’est transposé sur scène pour devenir Âme en exil, un dix pièces qui constituent un projet très personnel à l’artiste par les thèmes qu’il aborde. Il libère la parole pour évoquer «ces choses que l’on rencontre tous sur notre trajet de vie», dit-il.

«Je peux passer de mon parcours d’immigrant par exemple à des histoires personnelles comme les enfants, les relations de couple. Il y a des moments suspendus comme des choses que l’on vit tous comme dans un café.»

Dans Âme en exil, le conteur s’adresse à l’Autre. Comme un levier, la parole se tisse et se tend entre lui et le spectateur. Il «parle de nous même quand il parle au je», même quand les sujets sont intimement liés à l’artiste.

«La posture du conteur, c’est d’être ce canal qui fait circuler les émotions. Il est aussi témoin de l’autre et de ce qu’il dit parce qu’on espère être sans filtre, être juste là.»

Et quand Franck Sylvestre parle de nous, il parle du sens de la vie, d’une forme de spiritualité commune qui gravite autour de l’universalité. Il se tourne vers ses semblables pour parler de solitude, d’amour, d’exil et de la marque indélébile que laisse l’Histoire sur nos vies.

«J’ai écrit Âme en exil, mais je fais beaucoup de contes de tradition, souligne Franck Sylvestre. Et ces contes ont tellement été façonnés à travers les époques, les âges qu’on arrive à ces versions aujourd’hui et c’est à nous de les prendre et de les affiner encore pour d’autres. On fait partie de cette grande chaîne et d’avoir conscience de ça, c’est notre humanité qui s’exprime. Le conte, c’est une spiritualité, une philosophie, une conscience de notre vie sur Terre.»

Mais Âme en exil ne navigue pas seulement sur les eaux du conte. Le spectacle s’aventure aussi en danse, en musique, en poésie et en vidéo. Ces espaces s’articulent à la fois de façon dépendante tout en étant liés pour permettre au public de s’abandonner aux émotions comme elles viennent. Comme un tissage, les textes se répondent, sont pensés pour qu’ils aient un sens, comme une grande parole.

«C’est une atmosphère, ajoute l’auteur. On ne s’attend pas à une réaction du public entre les pièces. On y va et on est parti pour une heure et quart. C’est vraiment un moment de paix.»

«Comme un bon plat», Franck Sylvestre a cherché l’équipe entre ces formes d’art. «Il n’y a aucun ingrédient qui supplante les autres» puisque «tout le monde prend sa place quand c’est le temps». Tout est au service de la parole, véritable fil conducteur d’Âme en exil.

«Tout le monde utilise ce levier. Dans un solo de piano (Chantale Morin) par exemple, il parle, il raconte quelque chose. Ce n’est pas juste une suite de notes. C’est le spectacle qui nous unit tous.»

Sur scène, un module est basculé vers le public. Inspiré de La Tournée des grands espaces de l’artiste français Alain Bashung, cette scénographie agit sur l’instabilité de l’espace pour se «garder vivant», croit Franck Sylvestre. Chacune des dix pièces utilise d’ailleurs ce module d’une façon particulière et crée véritablement la chorégraphie (Carla Soto) où l’expression du corps est en harmonie avec la voix, la parole.

«Ça permet de débalancer son poids. Automatiquement, on réagit autrement, la voix ne sort pas pareil.[…] J’aime l’expression du corps, ouvrir le champ de la parole au corps.»

Composé par Guillaume Soucy (électro, basse, percussion), l’aspect musical du spectacle est fondamental et très puissant, selon l’auteur. Précise et progressive,

«

La posture du conteur, c’est d’être ce canal qui fait circuler les émotions. Il est aussi témoin de l’autre et de ce qu’il dit parce qu’on espère être sans filtre, être juste là.»

— Franck Sylvestre

la musique prend la parole et raconte elle aussi ces histoires.

Franck Sylvestre est issu du théâtre, mais le conte lui est tombé dessus par hasard. Et comme tous ces heureux hasards qui provoquent en nous la découverte, l’artiste ne l’a plus jamais quitté.

Mis en scène par Jocelyn Pelletier, Âme en exil est présenté par la Maison des arts littéraires le 1er avril à 20h à la salle Jean-Despréz.

ARTS ET SPECTACLES

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2023-03-25T07:00:00.0000000Z

2023-03-25T07:00:00.0000000Z

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