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MA DERNIÈRE CHRONIQUE?

DENIS GRATTON CHRONIQUE dgratton@ledroit.com

Ouf ! Il ne sera pas facile ce combat. Mon adversaire est redoutable, impitoyable, intraitable. La lutte sera inégale.

Mais je vais tout de même me battre. Un p’tit cul de Vanier ne recule devant rien. Je serai dans mon coin, gants aux poings. Pas le choix. Même si je sais que je serai le David contre le Goliath.

Le nom de ce « Goliath » ? Vous le connaissez tous. On l’appelle « cancer ». Le cancer des poumons, dans mon cas. Un adversaire intraitable, disais-je. Je suis resté bouché bée lorsque le médecin de l’hôpital Montfort m’a annoncé ça. Manon aussi. Nous n’avons pas reculé dans nos chaises, comme dans la publicité télévisée d’il y a quelques années. Nous sommes juste restés stupéfaits, sans mot. Le cancer. Ouf !

Donc vous comprendrez que je devrai m’absenter pendant un certain temps, la gang. Et je ne sais pas combien de « rounds » durera ce combat.

Cette chronique que vous lisez aujourd’hui est-elle ma dernière ? Je ne sais pas non plus. J’espère que non, mais je ne sais pas. Si oui, s’il s’agit bien de ma dernière en 32 ans au Droit, je vous remercie de m’avoir lu toutes ces années. Vous savez comment gros je vous aime, la gang ? Sachez que je vous aimerai toujours autant.

Toujours aussi gros. Toujours et tout le temps.

J’ai peur, je l’avoue. J’ai très peur. J’ai toujours craint la mort. Mais je ne serai pas seul dans ce combat.

Manon, que j’ai rencontrée au

Droit et qui est à mes côtés depuis les 29 dernières années, sera avec moi tout au long de cette lutte. Une chance que je l’ai. Je serais perdu sans elle.

Mon fils Jean-Michel sera là aussi. Et il est fort, mon Jean-Michel. Il saura me soutenir quand je vais chanceler.

Ma petite-fille de deux ans, Mélodie, y sera à sa façon. Mon rêve de la voir grandir me permettra de m’accrocher lorsque les genoux me plieront.

J’ai mes soeurs et mes frères avec moi, ma famille, mes proches, de très bons amis, mes collègues du

Droit.

Non, je ne serai pas seul. Je suis chanceux. Je sais qu’il y aura des moments où je me sentirai bien seul au monde. Mais tout cet amour qui m’entoure me réchauffera le coeur dans les moments les plus durs et les plus lourds.

Est-ce ma dernière chronique ? Si oui, ce serait une drôle de coïncidence puisqu’elle est publiée le 25 mars, à deux jours des 110 ans du Droit. Et lui il connaît ça les combats ! Le Règlement XVII, Penetanguishene, Sault-Ste-Marie, S.O.S. Montfort, Ottawa bilingue, le Jeudi noir, et tant d’autres luttes au cours des décennies. Le Droit a toujours été là, au front. Et il a connu des moments difficiles, notre bon vieux

Droit. Mais il s’est toujours relevé grâce à des gens dévoués qui croient en leur quotidien. Le Droit est toujours debout, droit comme un chêne, après 110 ans. Je lui en souhaite 110 autres.

C’est drôle quand je pense à ça, mais j’ai passé plus de la moitié de ma vie au Droit. D’ailleurs, ce journal est un peu ma vie.

C’est au Droit, comme je disais plus haut, que j’ai rencontré Manon. J’ai eu la chance de travailler avec les meilleurs collègues au monde. Certains sont devenus mes amis et le seront à vie.

J’ai eu la chance de rencontrer des centaines, voire des milliers de gens extraordinaires qui, par leur histoire, leur vie, leur courage, m’ont tant appris de la vie. Et certains sont aussi devenus des amis à vie.

Le Droit m’a permis de voyager et de visiter des endroits que je n’aurais jamais pensé voir de mes yeux. Et partout où il me déléguait, j’avais la chance et le privilège de vous raconter, un peu comme si je vous emmenais avec moi.

J’ai été chanceux. J’ai été choyé.

Quel autre endroit et quel autre métier m’auraient permis de devenir interprète d’une journée dans un procès pour meurtre à Houston, au Texas ? Ou de piloter un Snowbird dans le ciel d’Ottawa ? Ou de sauter à bord d’un hélicoptère Sea King, en Italie, pour aller « atterrir » sur le destroyer canadien Iroquois en plein milieu de la mer Adriatique ? Ou de prendre une bière sur le bord de la mer avec Jean Béliveau, en Nouvelle-Écosse ? Ou de danser avec Soeur Angèle !?

Le chroniqueur Denis Gratton, accompagné de Manon — COURTOISIE

Cent dix ans lundi, notre vieux Droit. Il a bien changé au fil des ans. Il a bien vieilli. Il a même rajeuni maintenant qu’il est numérique !

Je suis fier d’y contribuer. Un journaliste du Droit a comme mission, entre autres, de voir à la pérennité de son journal. De le porter bien haut et d’en être fier. Il doit entretenir la flamme et tendre le flambeau le moment venu.

Si cette chronique est ma dernière, je me tape dans le dos, si vous me le permettez, en me disant très humblement : mission accomplie. J’aurai fait ma petite part pour que la flamme brûle toujours et à tout jamais.

Je l’aime, mon Droit. Il est ma vie. Maintenant vous m’excuserez, j’ai un combat à aller livrer. Je vous reviens dès que possible. Salut la gang !

Longue vie au Droit !

À nous deux, cancer.

LA UNE

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2023-03-25T07:00:00.0000000Z

2023-03-25T07:00:00.0000000Z

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