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Un baron du bois cultivé

MICHEL PRÉVOST Collaboration spéciale

La vallée de l’Outaouais compte plusieurs barons du bois au XIXe siècle. Allan Gilmour est l’un de ceux qui font fortune en exploitant les grandes forêts de la région. Gilmour est né le 23 août 1816 dans la paroisse de Shotts, en Écosse. Il ne faut pas le confondre avec son oncle Allan Gilmour (1805-1884), riche marchand de bois écossais.

En 1832, Gilmour envoie son neveu Allan à Montréal, avec son cousin James, pour travailler comme commis à la succursale William Ritchie & Co. Leur arrivée donne un nouvel élan à l’entreprise qui place des agents dans les coins éloignés pour déloger les concurrents. En 1840, Ritchie part à la retraite et les deux cousins assurent la succession et renomment la compagnie Gilmour & Co.

La firme acquiert, dans les années 1840, plusieurs propriétés dans le but de renforcer sa position dans l’industrie forestière. De plus, elle ouvre une succursale à Bytown (Ottawa), un centre important pour l’industrie du bois dans l’Est ontarien et en Outaouais.

La Gilmour investit du côté de la rivière Gatineau lorsque le monopole de coupe de la Gatineau se termine en 1843. À la même période, la baisse des droits protecteurs, qui favorise l’accès du bois non encore équarri des colonies sur le marché anglais, incite les producteurs à s’intéresser au bois de sciage destiné aux Américains.

UN DÉMÉNAGEMENT À BYTOWN

En 1853, Allan Gilmour déménage à Bytown où il établit le siège social de sa firme. La Gilmour & Co. devient l’une des plus importantes entreprises de bois non équarri au Canada. Elle possède des actifs notamment à Ottawa, à Hull, à Maniwaki et à Trenton.

En réalité, la Gilmour s’avère l’une des rares entreprises de bois équarri qui effectue avec succès la transition vers le bois scié. D’ailleurs, c’est ce qui explique que la compagnie emploie des milliers de travailleurs dans la région, dont plusieurs sont d’origines canadiennes-françaises.

Robert Gillis note, dans le Dictionnaire biographique du Canada, que Gilmour est constamment rongé par l’inquiétude et qu’il se tient à l’écart des activités quotidiennes de son entreprise. Il ajoute que cette réserve le distingue des autres marchands de bois de l’époque, qui travaillent souvent côte à côte avec leurs hommes à la scierie ou dans les bois.

D’ailleurs, un de ses employés, James Murtagh, brosse un portrait peu chaleureux de son patron. Il le décrit comme « un homme d’une grande force de caractère qui avait tendance à se mettre en colère sans raison valable chaque fois qu’un problème surgissait à la scierie. Il parlait rarement aux ouvriers sauf pour les saluer et il n’entretenait aucun rapport avec eux, quoi qu’il arrive. »

Certes, au début, Allan Gilmour a des raisons de s’inquiéter puisque ses affaires ne vont pas si bien et, en 1857, son cousin et partenaire James meurt.

Toutefois, il embauche rapidement un Écossais, John Mather, qui dirige avec succès les exploitations forestières et les scieries. Ce dernier transforme la compagnie en une entreprise importante.

En 1860, grâce au Traité de réciprocité signé en 1854 avec les Américains, les affaires de la Gilmour & Co. prospèrent, mais au milieu des années 1870, une grave dépression frappe les pays industrialisés et les forestières de la région.

UNE RETRAITE DORÉE

En 1873, Gilmour se retire des affaires. Comme il est célibataire, l’entreprise passe à d’autres membres de la famille engagés dans l’industrie forestière à Québec.

À la retraite, le richissime homme d’affaires s’adonne à la chasse, à la pêche, à lecture et aux voyages. Dans sa luxueuse demeure ottavienne, Gilmour rassemble l’une des plus imposantes collections d’oeuvres d’art du pays, dont des tableaux de l’illustre Cornelius Krieghoff. En fait, comme l’écrit Gillis, « il vécut une vie tranquille et raffinée ».

En 1879, Gilmour fonde avec d’autres l’Art Association d’Ottawa pour promouvoir la fondation d’une galerie nationale et d’une école des beaux-arts. Dans les années 1880, le mécène devient président et vice-président de cette association.

Ce dernier est sans doute le baron du bois le plus cultivé de son époque. Passionné par les arts, la poésie et l’histoire, il est membre d’instituts littéraires et scientifiques d’Ottawa.

Allan Gilmour décède le 25 février 1895, à l’âge de 78 ans. Il repose au cimetière Beechwood d’Ottawa. Le baron du bois ottavien laisse un héritage considérable de 1 452 825 $ et une précieuse collection de 146 oeuvres d’art. Une rue de la capitale rappelle sa mémoire.

Sources:

Connexion Patrimoine capitale,

« La rue Gilmour », https://www. patrimoinecapitale.ca/noms-ruesdottawa/, consulté le 4 janv. 2023. Louise Dumoulin, « La fabuleuse histoire de la Gilmour », http:// histoireoutaouais.ca/la-fabuleusehistoire-de-la-gilmour/, consulté le 2 janv. 2023.

Robert Peter Gillis, « Gilmour, Allan (1816-1895) », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 12, Université Laval/University of Toronto, 2003, http://www.biographi.ca/fr/ bio/gilmour_allan_1816_1895_12F. html, consulté le 24 janv. 2023.

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